Transsibérien : entre idées reçues et réalité

29 Octobre 2018 , Rédigé par alain pont Publié dans #transsibérien

"La Russie est la terre de l'humilité. Ses plaines n'ont que le ciel pour bornes, ses forêts, la hache les a entamées à peine, ses fleuves géants, à la crue des eaux, s'étalent comme des bras de mer"

Joseph Kessel, "La Steppe Rouge"

Nous voici à la fin de notre périple. Nous n'avons pas eu de mauvaises surprises. Les Russes sont charmants et accueillants. Absolument aucun problème d'insécurité nulle part. Bon, c'est vrai aussi que nous ne sommes pas des noctambules !

Sans généraliser, les Russes sont plutôt distants au premier abord. Il ne faut donc pas hésiter à les aborder pour engager la conversation. Mais le premier pas franchi, ils nous ont tenu des discours sans fin en russe malgré nos incompréhensions. Toujours avec le sourire ! Très rapidement nous étions identifiés comme étant français. Dans la partie Est de la Sibérie, les jeunes russes nous abordaient pour faire de nombreux selfies. Bon, si ça leur fait plaisir ...

Transsibérien : entre idées reçues et réalité

Avant de partir nous avions minutieusement préparé ce voyage. Nous avions lu maints récits sur l'alcoolisme et la corruption. Pour ce qui nous concerne, nous n'avons jamais été importunés par la police. Nous n'avons également jamais vu d'ivrogne. Il faut dire que dans le Transsibérien l'allure parfois revêche de la provodnista tempère toute velléité de perturbation. Le seul incident auquel j'ai assisté est un tout petit chahut provoqué par quelques jeunes allant voir un match de foot, vivement étouffé par la provodnista qui, seule contre tous, a fait rapidement taire tout le monde. Je ne sais pas quels mots ou quels arguments ont été employés, mais ils ont été efficaces. En plus, sur les quais ou dans les gares la police est très présente.

Les wagons du Transsibérien sont plus volumineux que les trains européens. Les voies étant de 11 cm plus larges que celles de nos trains, les compartiments sont plus vastes. Selon les historiens, cette décision de faire des voies spécifiques pour le monde russe avait pour objectif de retarder les invasions. En 1941, cela a effectivement empêché les nazis d'utiliser le réseau soviétique.

La grande taille des wagons se vérifie aussi dans leur hauteur. Pour descendre et ouvrir les portes, la provodnista, toujours en uniforme, doit soulever une trappe, déployer les marches et soigneusement nettoyer les rampes d'accès. Ce n'est qu'ensuite, que vous pouvez descendre.

Ah! la provodnista ! Toujours en train de s'affairer, de contrôler, de nettoyer, de vérifier le niveau du samovar, de remettre les rideaux que certains voyageurs indélicats mettent en tire-bouchon pour mieux voir l'extérieur, de demander aux voyageurs qui descendent de déposer leurs draps, et de donner aux nouveaux leur paquetage. Elles sont parfois tellement épuisées qu'une fois j'ai été obligé de la réveiller alors qu'elle s'était profondément assoupie pour qu'elle nous ouvre le wagon.

Sur le quai (les passagers sont en tenue "décontractée")

Sur le quai (les passagers sont en tenue "décontractée")

Les gares des villes sont toujours des monuments majestueux et en parfait état. Ce sont même souvent les plus beaux immeubles des villes.

A la campagne, les arrêts sont de simples quais avec un petit abri. Le nom de la gare est alors simplement le nombre de kilomètres jusqu'à Moscou : gare 2557.

Un petit détail qui a son importance. Environ quinze minutes avant un arrêt en gare, la Provodnista ferme les toilettes. Il est donc préférable d'anticiper cette fermeture qui peut des conséquences désagréables !

La gare de Vladivostok

La gare d'Irkoutsk

La gare de Yurga

La gare de Tomsk

L'intérieur de la gare de Nijni Novgorod

Lors d'un arrêt, nous avons vu nos compagnons de compartiment nous quitter et deux autres prendre leurs places. C'est toujours avec un peu de nostalgie que nous voyons partir des personnes que nous ne reverrons jamais. Et toujours avec curiosité que nous échangeons avec nos nouveaux compagnons.

Cette fois-ci, l'un des arrivants qui ne parlait ni le français ni l'anglais et qui avait une tête d'artiste avec une magnifique et longue chevelure blanche traduisant son âge, nous fit comprendre qu'il était régisseur d'un théâtre. En Russie, l'art, le théâtre et l'opéra tiennent une place importante.

Bref, ce brave homme, sympathique par ailleurs était atteint d'une toux permanente, grasse et très déplaisante. Il occupait comme moi la couchette du bas. Lorsque tout le monde se coucha et que les lumières furent éteintes ,commença une longue, très longue, très très longue séquence de toux. Moi, dans mon lit, je m'étais réfugié sous les draps m'imaginant revenir en France avec une tuberculose au stade terminal. Le pauvre homme était assis sur son lit, à quelques dizaines de centimètres de moi et il avait une infinie difficulté à respirer. Enfin après une paire d'heures, il parvient enfin à s'endormir. Ouf!, je vais enfin pouvoir dormir. Mais cela faisait à peine quelques minutes que le silence était enfin revenu, qu'il se mit à ... ronfler bruyamment.

Le restaurant de la gare de Khabarovsk

Nous avons constaté que plus nous allions vers l'ouest, c'est-à-dire plus nous nous rapprochions de Moscou, plus les wagons étaient confortables (parfois pour des détails) et mieux les rails étaient ajustés. Parfois entre Vladisvostok et le lac Baïkal de violentes et bruyantes secousses nous réveillaient en pleine nuit.

Une petite sieste en 2éme classe

Quel trajet du transsibérien ?

Incontestablement dans le sens Est-Ouest même si vous commencerez par le plus beau. Et si vous ne pouvez faire qu'une partie ce sera de Vladivostok au lac Baïkal. Dans ce sens et à cette saison, nous n'avons rencontré aucun touriste. Les couleurs et les paysages étaient magnifiques. Et il faisait un temps superbe.

Quelle classe choisir ?

La 3ème classe emporte le vote du cœur, la 2ème classe celui du confort. Surtout si vous mesurez plus de 1m75.

Les russes sont très discrets. En 3ème classe nous n'avons jamais été dérangés par des conversations bruyantes ou sans fin. L'extinction des feux se fait vers 22H et ensuite il n'y a plus de bruit.

Quel emplacement dans le wagon ?

Plutôt vers le milieu du wagon pour éviter les secousses des bogies.

Quelle place dans le compartiment ?

C'est compliqué ! A deux le meilleur choix est l'un en haut et l'autre en bas.

Seul ? en bas, vous verrez votre banquette squattée par les autres voyageurs. Si vous choisissez la banquette du haut, c'est vous qui squatterez la banquette du bas ... à condition que le voyageur l'occupant ne dorme pas. Ce que font les russes à longueur de nuit et de journée.

Que faire dans le Transsibérien ?

Rien. Rêver, rêvasser, regarder, discuter, lire un peu, boire du thé.

La et les toilettes dans le Transsibérien ?

La toilette sera dans tous les cas minimale. Il faudra oublier la douche ! Quant aux toilettes, elle ne vous donneront pas envie d'y séjourner bien longtemps !

En 3éme classe

L'inévitable samovar (attention à ne pas se bruler)

Enfin quelques autres petits détails.

Le transsibérien ne roule pas très vite. Il est d'une ponctualité à faire pâlir notre SNCF.

Dans le couloir des wagons de seconde classe, un tableau des horaires est affiché. Il indique les heures d'arrivée et de départ pour chaque gare mais aussi les franchissements de fuseaux horaires. C'est bien pratique.

Le samovar situé en tête de wagon sera le point d'eau très chaude permettant de vous préparer du thé ou des soupes lyophilisées.

Et ne jamais oublier d'être en bons termes avec la provodnista !